À Mlle Jeanne de Donéa j’envoie pour sa bien venue tous les plus jolis petits bonheurs du monde par ma sainte patronne la Fantaisie.

Impossible ! Mon cher Léon ! je pars Mercredi Soir pour Paris, il y a l’Exposition Fortuny Jeudi ! et l’autre, la grande ouvre Samedi ! Il y aura du bruit dans le Landernau des peintres ! – et Lundi la première représentation du Printemps, théâtre de la Foret de St Germain, décors du Bon Dieu, paroles du poete Cupido, musique du maestro Philomela ! et je veux être à ma stalle pour le lever du soleil ! que dirait Mlle la Rosée si je n’y étais ! – Que veux-tu mes yeux rassasiés de la neige des pôles Nord, et la neige d’épaules de Monaco, ont besoin de se mettre au vert. – Et voilà mes guêtres bouclées comme aux grands jours de voyage, et la boite à couleurs est prete et les pinceaux à leur poste ! Les anémones nemoroses et les corydales roses ont déja fleuri sans moi et cela a fait jaser sous bois ! – j’ai certains rendez vous mystérieux avec les muguets que je n’oserais manquer pour une impératrice, et je vais dire leur fait aux mandragores !

Je ne m’excuse pas auprès de Madame de Donéa, – quand je pense à toutes les excuses que je devrai lui faire je me sens rougir comme les demoiselles pubertes qui voient passer un sous lieutenant & je ne saurai par quel bout commencer. Si je peux j’irai avant mon départ lui demander un morceau de pardon parce que je n’ose espérer qu’elle me l’accordera tout entier.